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Les mangroves, des écosystèmes indispensables

« La mangrove, c’est sale, ça se voit rien qu’à la couleur de l’eau n’est ce pas ?  D’ailleurs, c’est le paradis des moustiques ! »

De nombreuses idées reçues sont véhiculées sur les mangroves. Fortement menacées, ces forêts ont diminué de 50 % au cours des dernières années. Pourtant ces écosystèmes sont indispensables au bon fonctionnement écologique de nos îles, nurseries, filtre, piège à carbone… ce sont autant de rôles méconnus de ces mangroves qui en font désormais des milieux totalement protégés. La mangrove avec ses eaux turbides joue un rôle indispensable pour la bonne conservation des écosystèmes voisins. Véritable interface terre-mer sous les tropiques, elle rend aux hommes des services écosystémiques multiples irremplaçables.

Nul ne sait encore aujourd’hui faire mieux que Dame nature !

Alors laissez-nous vous dévoiler tous les secrets de la mangrove !

La mangrove, un filtre indispensable pour les coraux

Les écosystèmes tropicaux caribéens sont « oligotrophiques », c’est à dire qu’ils sont pauvres en substances nutritives. Ces milieux ont la particularité d’avoir des eaux limpides, permettant la croissance des coraux, qui peuvent ainsi plus facilement capter la lumière du soleil nécessaire à leur croissance. Mais saviez vous que sans les mangroves, les coraux auraient peu de chances d’exister ?

En effet, sur nos îles tropicales, les pluies régulières lessivent les sols, provoquant lors des crues l’arrivée d’importantes quantités de matière en suspension dans l’eau de mer. Grâce à leur système racinaire en échasses, les palétuviers piègent ainsi la matière organique et minérale et permettent de conserver dans les lagons une eau claire et limpide. Sans la mangrove et son eau « sale » pas de coraux !

Mais saviez-vous que cette eau si chargée en nutriments est une véritable aubaine pour les juvéniles de poissons et crustacés ?

La mangrove une crèche sous-marine

Rappelez-vous, nos écosystèmes sont pauvres en nutriments, comment font donc les larves de poissons et crustacés pour survivre et abonder sur nos récifs ? Grâce à ces eaux chargées en nutriments, des quantités non négligeables de phytoplancton se développent dans la mangrove, (voir l’article « l’océan, origine de vie ») et nourrissent nos larves de poissons, crustacés ou mollusques qui migreront à l’âge adulte vers les herbiers ou récifs à proximité.

En plus d’y trouver le couvert, ces juvéniles peuvent facilement trouver un gîte pour se protéger des prédateurs au milieu de la forêt sous-marine créée par les racines des nombreux palétuviers. C’est ainsi que les îles dotées de mangroves possèdent également une biodiversité en poissons plus importante que les autres.

Le meilleur rempart contre les inondations et la houle

Les mangroves rendent encore de nombreux autres services aux humains. Elles ne se contentent pas de filtrer la matière organique, elles sont également de véritables éponges en permettant de limiter les inondations. Et par temps sec, elles restituent l’eau absorbée lors des crues, permettant à la végétation et la faune alentours de subsister.

Et si vous doutiez toujours de leur utilité, sachez qu’elles sont notre meilleur rempart contre l’érosion, et les tsunamis…

https://www.youtube.com/watch?v=aoMrLYJOdA4

Dans la vidéo ci-dessus, on remarque que les vagues sont complètement atténuées par la présence des arbres, il en est de même en milieu naturel. Grâce aux arbres, l’atténuation de la houle permet de limiter l’érosion des côtes, et parfois même de créer des petites îles…

En Guadeloupe en effet, de nombreux îlots de mangrove se créent au gré des courants permettant à l’avifaune de trouver refuge loin du tumulte des hommes.

Un écosystème encore méconnu

Bien moins attirantes que les écosystèmes coralliens les mangroves abritent des espèces encore méconnues, c’est ainsi que récemment, la plus grande bactérie au monde a été découverte en Guadeloupe par une équipe de chercheurs de l’Université des Antilles. Auparavant, on y avait découvert une autre géante, une Archaea, ancêtre de nos cellules complexes.

 

Maintenant que vous connaissez tous les mystères de la mangrove, regardez-la d’un autre œil la prochaine fois que vous vous ferez piquer par les moustiques !

 

 

 

Bibliographie :

Mumby, P., Edwards, A., Ernesto Arias-González, J. et al. (2004) Mangroves enhance the biomass of coral reef fish communities in the Caribbean. Nature 427, 533–536 .

Nagelkerken, I., Kleijnen, S., Klop, T., van den Brand, RACJ, de la Morinière, EC, van der Velde, G.(2001). Dependence of Caribbean reef fishes on mangroves and seagrass beds as nursery habitats: A comparison of fish faunas between bays with and without mangroves/seagrass beds. Marine Ecology-progress Series - MAR ECOL-PROGR SER. 214. 225-235. 10.3354/meps214225.

Muller, F.,  Brissac, T., Le Bris N., Felbeck H., and Gros O., (2010) First description of giant Archaea (Thaumarchaeota) associated with putative bacterial ectosymbionts in a sulfidic marine habitat Environmental Microbiology 12(8), 2371–2383 doi:10.1111emi_2309 2371..2383

Volland, JM., Gonzalez-Rizzo, S., Gros, O.,  Tyml, T.;  Ivanova, N.,  Schulz, F., Goudeau, D.,  Elisabeth, N.H., Nath, N., Udwary, D., Malmstrom, R.R., Guidi-Rontani, C., Bolte-Kluge, S., M Davies, K., Jean, M.R.,  Mansot, JM., Mouncey, J.R.,  Angert, E.R., Woyke T., Date, S.V., (2022) A centimeter-long bacterium with DNA contained in metabolically active, membrane-bound organelles., Science, 376, 1453–1458.