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Le requin-citron : le Grand cul-de-sac se met au jaune !

Scientifique
Le Grand Cul-de-sac marin a accueilli de nouvelles naissances ces derniers mois : de jeunes requin-citrons ! Aperçu au nord de l’îlet Fajou, dans le Grand Cul-de-sac marin, des juvéniles âgés de quelques mois à 3 ans investissent les lieux le temps de grandir.
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Requin citron © Alain Goyau

En effet, comme beaucoup de requins, les requins-citron (Negaprion brevirostris) mettent au monde leurs petits en eau peu profonde pour leur éviter la confrontation avec de nombreux prédateurs des grands-fonds, leur fournir des proies en quantité et des eaux chaudes, favorables à une croissance rapide. Pour mettre les nouveau-nés en sûreté, « maman-citron » va même plus loin, puisqu’elle leur donne naissance dans les mangroves et récifs où elle a vu le jour plusieurs années auparavant, renforçant l’importance de préserver ces sites uniques pour le bien-être des populations de cette espèce. Ainsi en sécurité, les jeunes prédateurs vont grandir et rôder parmi les récifs jusqu’à l'âge adulte.

Présente sur les côtes tropicales de l’océan Atlantique, sur une partie des côtes tempérées de l’Amérique du Nord et sur une partie de la façade Pacifique, c’est seulement durant sa migration que l’espèce s’accorde de brefs passages dans des eaux plus profondes que celles des côtes. Cette caractéristique explique le fait que l’animal soit observable partout dans la Caraïbe.

Reconnaissable à ses deux nageoires dorsales de taille quasi-égale, son identification est des plus faciles ! Son profil au museau arrondi et à la mâchoire inférieure bien plus courte que la supérieure, laisse voir des dents triangulaires, fines et lisses. L’aspect général de l’animal est celui d’un requin trapu, imposant, pouvant atteindre jusqu’à 3,80m de long avec une différence de taille entre les deux sexes (les mâles sont plus petits que les femelles).

La durée de gestation de l’espèce se situe entre 10 et 12 mois et la femelle donne naissance à une portée de 4 à 17 petits de 62 cm de longueur environ. La maturité sexuelle est atteinte entre 6 et 7 ans, chaque requin ne se reproduisant qu’une fois tous les deux ans, au Printemps.

Vivant jusqu’à 30 ans, cet animal est solitaire, sauf sur les sites de nourrissage et est actif majoritairement à l’aube et au crépuscule, probablement pour faciliter la chasse de ses proies. Son régime alimentaire comprend une large palette d'animaux tel que les crustacés, mollusques, poissons voire d’autres requins plus petits. Il arrive même souvent que des individus adultes mangent des juvéniles de leur propre espèce !

Dernier maillon de la chaîne alimentaire dans son aire de répartition, il endosse le rôle de régulateur. Negaprion brevirostris, dans le cas des populations du Grand Cul-de-Sac Marin, est impacté négativement par la dégradation des habitats favorables à son développement car sans ce site, c’est une fraction entière cette population qui se retrouverait amputée d’une zone de nurserie. Pour toutes ces raisons, cette espèce mérite qu’on lui porte une attention particulière, pour éviter de la compter parmi les animaux « en voie d’extinction » dans les années à venir.

Bien entendu, le Parc national et ses partenaires se sont intéressés à ce patrimoine naturel, notamment en 2014 et 2015, par le biais d’une étude des élasmobranches : une classe rassemblant l’ensemble des requins et raies. Le but de l’étude était d’identifier les espèces de requins et raies présents dans le Grand Cul-de-Sac Marin, ainsi que leur évolution au cours du temps. La méthode utilisée était celle de la capture, marquage et recapture, pour perturber le moins possible les individus. Ces recherches, en association avec l’Université Internationale de Floride, ont permis de mettre en relief la diversité des espèces présentes sur les côtes, ainsi qu’une population de requins peu élevée par rapport à d’autres sites de la Caraïbe. Ces résultats rendent d’autant plus importante la conservation des requins sur l’ensemble de la Guadeloupe.

L’espèce est classée comme quasi-menacée sur la liste rouge de l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN). Comme la majorité des requins du globe, la population de Negaprion brevirostris est impactée négativement par la surpêche de sa ressource en nourriture, la pollution ou encore la pêche, notamment pour ses ailerons, sur toute son aire de répartition. D'autres entités ont bien compris cet enjeu et œuvrent à sa préservation, comme l'association Kap Natirel, et le réseau REGUAR.